Covid-19 : Journal d’une Mauricienne confinée, J-1

Covid-19 : Journal d’une Mauricienne confinée, J-1
Il y a quelques jours à peine, on était loin de penser que nos vies allaient amorcer un tel virage…

Mais c’était sans compter l’éclosion du coronavirus dans l’île et l’ampleur des changements que celle-ci allait entraîner dans son sillage.

 

06h27. Mes paupières sont encore lourdes. Une légère migraine me nargue. La nuit a été agitée. Et non, je n’ai pas fait des galipettes ! Les mots «covid-19», «lockdown» et «confinement sanitaire» passent en boucle dans ma tête. Mes neurones s’affolent ! Cloîtrée à la maison avec mari (pourvu que ça ne se solde pas par un divorce comme c’est le cas de bien des couples en Chine !) et enfants. Bon, positivons, certaines doivent se taper la belle-mère. Avec comme ouverture sur le monde, l’écran. De mon téléphone, de mon laptop, de ma télé. Ça en fait des écrans ! Il me faut un café. Mais hypnotisée, j’avale les «latest news» qui défilent sur mon écran de téléphone en même temps que mon café qui, bizarrement, me semble amer aujourd’hui.

 

08h00. Question existentielle : comment vais-je m’habiller pour entamer cette première journée en «remote» ? Un article lu sur elle.fr me vient en tête : Doit-on rester en jogging pendant la période de confinement ? Vu la chaleur, j’abandonne très vite l’idée, enfile un short et un tee-shirt après une douche rapide. Mon autre écran m’attend, celui de mon ordi.

 

09h00. Je libère mon esprit de toute interférence «covidienne» et me mets au travail. Pas question de «chiller» en dépit du short. Mails, messages, appels téléphoniques, «video calls», prendre des nouvelles du fiston en confinement à Paris, entre autres, me permettent de ne pas faire une fixette sur cette saloperie de virus. Même si les notifs et autres «news alert» pleuvent et me rappellent sa présence.

 

13 heures. J’ai un petit creux. Impossible de manger. Je suis en plein «intermittent fasting» ! J’ai déjà perdu 5 kilos. Pas question de céder. Je discute un peu avec ma moitié. Les gamins sont scotchés à leur écran depuis ce matin. Pas la force de les gérer. Je sais, il faut leur établir un programme, les faire travailler, privilégier l’interaction, profiter de ce moment pour se reconnecter, etc. Mais bordel, leur père peut s’en charger au lieu d’être affalé devant l’écran à bouffer du Netflix jusqu’à l’indigestion ! Et non, je ne suis pas une mère indigne !!!

 

15 heures. L’open space me manque. Oublié les grincements de dents que mon voisin de bureau provoque chez moi à force de se balancer sur sa chaise. Je veux voir du monde. Mes collègues, mes potes, nos parties de rigolades me manquent.

 

16 h 25. Je pète un câble. Punaise, ils n’ont rien dans le crâne ces gens-là ?!!! On est en CONFINEMENT SANITAIRE ! Et c’est la foule à Bagatelle, à Flacq… La plage d’Albion est noire de monde… On déambule comme si de rien n’était dans la capitale et ailleurs… Et après ça va jaser, crier à tue-tête que les autorités ont mal géré. Non mais, c’est de l’incivisme ça !!! Il est temps de m’occuper des gamins. Un peu tard pour une pause goûter ? Bah, on a le temps devant nous.

 

19 heures. Toujours à l’affût des derniers développements. Coup de massue : 12 cas de Covid-19 recensés.

 

20 heures.  On dîne dans un joyeux brouhaha. La tribu est réunie. L’espace d’un repas, j’oublie la pression, l’angoisse. Quelque deux heures de répit ponctuées par les gamins que je mets au lit.

 

22 h 17. Je me remets au travail. Je réponds aux derniers mails tombés. Je prépare la journée de demain. Il faudra bien s’occuper et occuper les enfants sinon, ça sera l’anarchie.

 

00 h 20. Petite introspection sur cette première journée de confinement. Ting. Une notif. Je me plonge dans mon écran de téléphone. Facebook, Insta, lexpress.mu, lemonde.fr, L’Express-Spécial, L’Express-diX, L’Express-Flash… Les nouvelles ne sont pas bonnes. Je suis à cran. Il faut que je me détache de cet écran.

 

Illustration :Iloë 


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