Diksha Dabysing Baichoo : « Je souris à la vie, il le faut»

Diksha Dabysing Baichoo : « Je souris à la vie, il le faut»
Elle a vu le cancer du sein démonter sa vie en pleurant. Après le sentiment d’injustice qui l’a accompagnée pendant un an, la Senior Inspector au ministère du Travail raconte cette douloureuse étape et sa métamorphose physique sans tabou.

«Vous voyez la joie et l’envie de vivre qui m’animent presqu’en permanence, même sur les photos ? C’est parce qu’à 43 ans, je peux enfi n dire que le pire est derrière moi. Je croise les doigts. J’essaie de positiver en toutes circonstances. Pourtant, il y a un an de cela, j’ai tout perdu quand le cancer du sein est venu frapper à ma porte. Le crabe s’est invité chez moi, comme ça ! Il s’est installé dans mon sein droit, peinard.

J’étais loin de me douter que d’horribles mois, parsemés de moments extrêmement durs, m’attendaient au tournant. Mais une chose est sûre, le malheur n’arrive pas qu’aux autres. Je l’ai bien compris quand je constate, durant le confi nement en 2021, que j’ai une grosseur au sein alors que je soulève une bouteille d’eau. Rien ne m’avait ‘préparé’ à cette découverte. Je ne présentais aucun symptôme.

Le drame se déploie malgré moi après une visite chez un médecin radiologue et suivant les résultats de ma biopsie. La médecine met un nom sur cette étrange boule. Je fais face à ce fameux mot qui fait trembler les murs : cancer. La peur et l’angoisse s’installent en moi. Comment rester sereine face à ce diagnostic ? Comment être courageuse quand tout ce qui me vient en tête se résume à la mort ?

Les jours passent. Le cancer est toujours là. Je fais le va-et-vient à la clinique. Je mets ma vie entre parenthèses. J’attends. J’espère un miracle. Mais rien. Puis, vient ce jour fatidique. Le médecin m’informe que je dois absolument subir une ablation du sein pour vivre. C’est impensable ! Je ne crois pas mes oreilles. Je pleure. Je me refuse de contempler cette éventualité. Je préfère mourir. Je dis non à tout. J’ai comme une envie de courir pour aller je ne sais où. On veut s’attaquer à une partie de ma féminité...

Cette décision est bien plus que diffi cile. Cela me prend un mois. Mes parents, mon époux et mon médecin fi nissent par me convaincre. Je me prépare. Je suis enfi n prête à passer sur le billard. La chirurgie se déroule bien. Elle n’est pas trop douloureuse même. Je souffl e un peu, mais ce court moment de répit ne dure pas longtemps. Vient l’autre étape : celle de la chimiothérapie. 

L’expérience est d’une violence brutale. Je suis nauséeuse. Je suis malade comme un chien. Dès ma première séance de chimio, je commence à perdre mes cheveux. Muni d’une tondeuse, mon mari m’aide à me raser la tête. C’est fini. Plus de cheveux. J’ai le crâne lisse. Quelques fois, je porte une perruque pour ne pas être dévisagée. J’enchaîne les séances de chimio. Douze au total. Elles sont longues, ardues. Les traitements m’ont laissé des séquelles. Elle a entraîné des troubles au niveau de la peau. Je ressens toujours un engourdissement et des fourmillements au niveau de mon bras droit et au dos. Par moments, je suis comme paralysée. Mais je ne baisse pas les bras. J’essaie d’être bien. Je fais tout pour. Je vais au sport. Je souris à la vie car elle continue et puis, il le faut bien. Aujourd’hui, tout est redevenu à la normale. Cela m’a pris un an pour accepter ce changement. J’ai pensé à faire une reconstruction mammaire. Mais j’y ai renoncé. Je m’accepte comme je suis. Je porte une prothèse mammaire externe et ça me va. Et dire que je refusais de me voir nue dans le miroir il n’y a pas si longtemps. Que je ne pouvais pas voir mon visage non plus…

Durant cette étape traumatisante, j’ai puisé mon soutien de ma famille, de quelques-unes de mes amies et de mon époux. Même s’il est peu démonstratif et que les ‘je t’aime’ ne pleuvent pas, il a été plus que présent pour moi. Rien n’a changé entre nous ; notre vie intime est restée la même également. Si aujourd’hui, j’arrive à vous raconter ouvertement mon histoire, ce n’est pas pour rien. J’ai compris plein de choses de la vie. J’ai enfin ouvert les yeux. Ce cancer a aussi été une leçon. Certaines de mes ‘amies’ sont parties en apprenant la nouvelle. À croire qu’elles ont eu peur d’être contaminées ! Il en est de même pour certains proches qui ne m’adressent plus la parole. Le cancer est encore tabou, me semble-t-il.

À vous qui me lisez, il est important de vous faire dépister ; surtout si vous avez des antécédents. Aussi, cela aurait été bien si on pouvait trouver plus de solutions pour celles en rémission. Comme plus de facilités de se procurer des soutiens-gorge postmastectomie et des prothèses mammaires externes… Une chose est sûre, on est toutes vulnérables face à la maladie. Armez-vous de courage et de patience. Car quoi qu’il arrive, ‘life goes on’…»


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